Cette nouvelle a été rédigée par Marie-Pier Trépanier, doctorante en génie mécanique.
J’ai récemment eu l’immense privilège de faire partie de la délégation de l’Université Laval à la COP29, tenue à Bakou, en Azerbaïdjan. Cette expérience a été à la fois exaltante et déstabilisante, plongeant la jeune étudiante au doctorat que je suis dans le monde complexe des négociations internationales sur le climat.
Avant le départ : entre attentes et appréhensions
Avant de partir, j’étais remplie de fébrilité. Je voyais la COP comme un lieu où se décide l’avenir de la planète, un espace où les idées innovantes peuvent trouver un écho. J’espérais y trouver des liens directs avec ma recherche, qui explore la manière de concevoir des bâtiments pour atténuer les effets des changements climatiques tout en favorisant la justice énergétique. Je m’attendais à être impressionnée et à être confrontée à des réalités brutales—et je n’ai pas été déçue.
Une première immersion dans le chaos orchestré
Dès mon arrivée, l’ampleur de l’événement m’a frappée. Le site, à la fois monumental et préfabriqué, semblait déconnecté du monde extérieur—sans fenêtres ni repères temporels, comme si nous étions suspendus dans une bulle hors du réel.
Même trouver le bon métro ou le bon bus pour s’y rendre était un défi. Une fois sur place, je me suis vite aperçue que cette « bulle COP » était un mélange fascinant de tensions politiques, de manifestations engagées, et d’un chaos ambiant. Un endroit où l’urgence climatique côtoyait les lenteurs bureaucratiques et où les enjeux d'écoblanchiment parfois éhontés venaient rappeler les défis structurels persistants.
Dans ce chaos orchestré, le rôle de la société civile était vital. Les organisations non gouvernementales et les manifestations, bien que limitées par le pays d’accueil, portaient des messages puissants, challengeant les négociateurs et rappelant l’importance des liens directs avec les besoins des populations.
Points marquants : entre espoirs et réalités
J’ai exploré les différents pavillons, des espaces dédiés aux pays ou organisations, où se tenaient diverses activités et conférences. Ces lieux étaient parfaits pour le réseautage, permettant des échanges directs avec des acteurs-clés. Le pavillon du Canada était un point de ralliement réconfortant, offrant des visages familiers au cœur du tumulte.
Ce qui m’a marquée, c’est la présence écrasante des compagnies pétrolières et les discussions où la politique semblait souvent prendre le pas sur l’urgence climatique. J’ai été surprise par l’aspect très masculin. Le « boys club » était bien présent : des hommes, souvent d’un certain âge, imposants, qui semblaient parfois difficiles à aborder. Ce n’était pas le cas de tous, mais les micro-agressions et l’ambiance parfois pesante étaient notables. En tant que femme en ingénierie, cette réalité m’a rappelé l’importance de continuer à militer pour une inclusion réelle et durable dans ces milieux.
Malgré ces défis, j’ai été profondément inspirée par les regroupements de chercheurs et d’ingénieurs, des communautés dynamiques où l’esprit d’innovation et de collaboration était palpable. Ces rencontres m’ont montré que des solutions existent et qu’elles méritent d’être portées avec conviction.
Ce que j’emporte avec moi
Cette semaine à Bakou m’a enrichie, à la fois comme doctorante et comme citoyenne. Elle m’a permis de mieux comprendre les rouages des grandes décisions climatiques et de réfléchir à l’impact que je peux avoir à mon échelle.
En explorant la justice énergétique, j’ai observé comment les politiques internationales tentent d’intégrer, parfois maladroitement, une distribution équitable, une participation équilibrée et les besoins des groupes vulnérables. Ces échanges ont éclairé les différences Nord-Sud dans la transition énergétique, notamment sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. La COP m’a permis d’approfondir mes connaissances sur l’analyse des rapports stratégiques, comme ceux de l’IPCC, et d’échanger directement avec leurs auteurs.
En tant que chercheuse, j’ai renforcé les liens entre ma thèse et les enjeux globaux. En tant qu’humain, j’ai pris conscience que chaque action compte, même dans un monde qui peut sembler paralysé par l’inaction. Je reviens avec une motivation renouvelée pour contribuer à des solutions concrètes. Cette expérience, bien que parfois déconcertante, est une étape fondatrice de mon parcours vers un avenir plus juste et durable.
18 décembre 2024